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Après les cérémonies le cortège reprend le chemin de Lacoux. Elisabeth et Jacques ont suivi la noce main dans la main serrés l’un contre l’autre.
Le cortège se dirige aux sons de la vielle et de la musette vers la grange où va se dérouler le repas.
Il est environ quinze heures. Tous les invités sont attablés. François Boyer le père de la mariée, placé entre sa fille et son épouse Magdeleine Legal, va se lever pour ouvrir le repas.
A la table des mariés sont attablés les oncles, la tante Etiennette la marraine de Anne, Antoine, le parrain avec son épouse Anne Mouliera qui regrette que leur fils François soit absent de la fête retenu sur un chantier dans la région de Compiègne avec le Claude l’unique frère de la mariée.
A la droite d‘Anne Mouliera; Antoine, l’homonyme du mari de cette dernière, avec son épouse Elisabeth Bruneton. Ils sont venus de Glénic. Lasmier et Elisabeth sont côte à côte très près l‘un de l‘autre. A leur coté Marguerite la sœur de Anne avec son cavalier Pierre Peynot le frère du marié; en face Anne homonyme et sœur de la mariée avec son cavalier Pierre Brunaud.
Elisabeth pense que sa sœur a bien de la chance d’avoir trouvé époux. En même temps elle ose lancer un regard vers celui de Lasmier qui, lui, ne la quitte pas des yeux. Non loin d’eux, Anne Michaud et Jean-Antoine Tallaire pensent au jour qui scellera, à leur tour, leur amour. Près de Jean-Antoine Tallaire sa jeune belle-sœur; Louise Berger qui a épousé Pierre Tallaire le frère de Jean-Antoine. Face aux Tallaire, les cousins de la mariée; Antoine Tingault avec son épouse Marguerite Durant et leur fille Françoise, la fille d’honneur de la mariée avec son cavalier le cadet de la Jeanne Glomot veuve Michaud. Au bout de la table; Jean Dufour avec son épouse Marguerite Godard. Face à eux, les derniers jeunes mariés du village Antoine Belugeon avec son épouse Anne Lejeune. Joseph Belugeon est au coté de la veuve Germain. Le jeune Antoine Gerby, le fils de la Anne Belugeon qui n’est pas de la noce car récemment veuve de son époux Jean Gerby, flirt avec sa cousine Annette Glomot surveillée de près par ses parents Léger Glomot et Marie Belugeon. L’oncle de Jean Gerby, François Glomot et son épouse Sylvaine Guyot regardent tous ces jeunes d’un air amusé.
Les Bazot, Guinjard, Tomasson, Caffin et Guillemet sont également de la noce. Dans les chènevières de derrière la grange les enfants ; Jean Tingault, Françoise et Antoine Belugeon, Jean Germain, le fils Gerby, Jeanne Tommasson et Jean-Baptiste Caffin, chahutent en courant entre les pommiers et poiriers. Devant la porte de la grange, les ados ; Annet Godard et Pierre Brunaud complotent quelques farces et plaisanteries qu’ils « placeront » pendant le repas dont les premiers plats sont servis.
L’ aumaille, le savoureux pot-au-feu, est dans les assiettes et les verres. Les bols des parrains et marraines des deux mariés, sont remplis de vin. Les garçons ajoutent sournoisement des morceaux de sucre au breuvage de leur cavalière afin d’être bien « considérés ». Jacques Lasmier n’est pas le dernier à s’occuper du verre de sa cavalière Elisabeth. Le mélange vin plus sucre faisant son effet rend cette dernière beaucoup moins farouche.
Les pâtés à la viande font passer les vapeurs des jeunes cavalières. Après les ragoûts de veau et de mouton la plus part ont repris leur esprit. Mais pendant la dégustation des rôtis de porc et les volailles à la broche, les « coquins » recommencent leur manège et après les pâtisseries, tartes aux pommes, aux prunes et clafoutis, les jeunes cavalières sont complètement grises. Annette Glomot se serre contre la poitrine de Jean Gerby qui en profite pour lui prendre la taille. Anne Michaud est assise sur les genoux de son amoureux Jean-Antoine Tallaire. Elisabeth, un peu plus réservée, prend la main de Lasmier et laisse le bras de Jacques lui entourer les l’épaules.
Laissant la jeunesse profiter de la noce, les « vieux » commencent à quitter les lieux car il est l’heure, pour les femmes, de s’occuper des bêtes : Vaches, moutons, cochons, volailles etc. pendant que les hommes vont « curer » les écuries. Tout ce monde se retrouvera pour le bal et le deuxième repas où se joindront à la noce les voisins des villages alentours.
Durant l’intermède des corvées domestiques la jeunesse termine l’aménagement en salle de bal la grange des Guinjard qui jouxte la demeure de François Boyer et la grange des Tingault.
Vers les dix neuf heures, la noce se regroupe pour se diriger vers la grange Guinjard où les « veilleurs » venus des villages voisins sont déjà réunis en attendant l’ouverture du bal.
Juché dans le « chambrât », de tradition, les frères Belugeon forment l’orchestre. Joseph est à la Vielle, Antoine à la musette. François et Anne ouvrent le bal. Le marié a la charge de faire danser toutes les dames de la noce. La mariée doit répondre à toutes les invitations des hommes de la noce et des « veilleurs ». Pour la « bourrée » les jeunes hommes doivent aller inviter les femmes âgées. Les danseurs font raisonner les sabots sur le plancher improvisé. Les frères Belugeon varient aisément les danses. La « Bourrée » terminée arrivent le “Chibreli, le Pélélé, la Chèvre bure et l’Ageasse”. Après chaque danse, les musiciens jouent sur quatre notes la petite retournelle : « bigeas vous donc, bigeas vous donc » alors le danseur embrasse gentiment sa danseuse sur les deux joues. Pour Jacques Lasmier et Elisabeth Boyer les baisers frôlent de plus en plus les lèvres.
A une heure du matin toute la noce va de nouveau vers la grange « Boyer » pour le deuxième repas. Afin de se remettre en appétit, on remplace l’ aumaille par de la tête de veau. Arrivé au milieu du repas, sous l’effet de la bonne chair et du vin, les plaisanteries les plus grivoises les plus osées commencent à fuser. Ni la mariée ni les autres jeunes filles n’avaient le mauvais goût de s’en offusquer car le « grivois » n’a jamais écorché l’oreille de nos paysannes. Les parrains et marraines des mariés, coiffés de leur bonnet de rubans, ont la charge d’animer la nuit. Vers la fin du repas, l’un des garçons d’honneur se glisse sous la table, pince la jambe d’Anne qui pousse un grand cri, qui attire l’attention de tous les convives, puis ressort en tenant à la main un flot de rubans qu’il brandit. Il l’apporte à sa demoiselle d’honneur qui le coupe en petits bouts afin de les distribuer aux jeunes filles pour leur porter bonheur dans le but de faire espérer un heureux mariage. Elisabeth sert le sien très fort contre son cœur en regardant son cavalier Jacques Lasmier.
Arrive le moment des chansons. Les mariés se gardent bien de chanter pour ne pas attirer le malheur sur eux. La demoiselle d’honneur, Françoise Tingault, débute la séance. En patois, bien sur, les jeunes filles commencent par une romance sentimentale. Elles continuent par une chanson en l’honneur d’Elisabeth, la sœur de la mariée. En entendant cette chanson, Anne y va de sa larme et vient embrasser sa sœur en sanglotant. François Boyer, le père de la mariée, y va aussi de sa chanson en chantant la « Bénédiction d’un père à sa fille ». Pour terminer la séance, le vieux Bazot entonne la « Chanson de la mariée ». Cette chanson, annonce la fin du repas. François Peynot embrasse toutes les femmes de la noce et Anne tous les hommes puis tous les convives se lèvent de table en brisant sur le sol son assiette afin de porter bonheur aux nouveaux mariés. Tous reprennent le chemin du « bal » pour danser jusqu’au petit matin. Les mariés y paraissent un moment mais, dès que le bal bat son plein ils s’éclipsent discrètement avec la complicité d’Elisabeth et de Lasmier. Ils prennent avec l’aide d’une lanterne le chemin de Villelot pour se rendre aux Taches, dans la ferronnerie du père Peynot où ils se sont, dans le secret, aménagé un petit refuge pour leur nuit nuptiale espérant échapper aux désagréments de la « rôtie ».
Au petit matin, la jeunesse qui n’est pas dupe envoie en « éclaireurs » Annet Godard et Pierre Brunaud. Ils prennent d’office le chemin des Taches, bien renseignés par le petit Jean Germain qui avait vu dans la nuit la lueur d’une lampe à bougie se déplacer sur le chemin de Villelot. Musique en tête, les membres de la noce qui restent encore vaillants, emboîtent le pas des deux éclaireurs avec deux soupières, l’une avec la fameuse poule qui a, malgré elle, subi les festivités de la veille et qui vient d’être rôtie. L’autre contient les plumes de la malheureuse volaille. Arrivé devant sa forge le père Peynot ouvre la porte de son logis pour éviter que les garnements de la noce y pénètrent de force. Ils trouvent dans le lit nuptial une Anne toute rougissante et un François tout penaud. Des questions à la limite de l’obscénité sont posées à la jeune mariée qui reste bouche bée. Jean Tomasson et François Glomot présentent aux époux les deux soupières qu’ils doivent choisir. S’ils choisissent celle des plumes ils en seront recouverts mais c’est celle de la poule que François et Anne choisissent. François Glomot leur tend à chacun une aile. Mais dès qu’ils avancent la main pour la prendre, ils reçoivent sur les doigts des coups de bâton jusqu’à qu’ils comprennent qu’ils doivent d’abord se laver les mains. Cela fait, ils mangent leur aile de poulet. Sylvain Guillemet tend à chacun un verre de vin chaud fortement sucré et poivré pour les ragaillardir, les remettre de leur fatigue.. Une fois le breuvage avalé la noce, précédée de la musique des frères Belugeon, reprend le chemin de Lacoux. Les jeunes époux peuvent reprendre leur nuit interrompue certains cette fois de ne plus être dérangés.
Au petit matin François et Anne voient arriver, de nouveau, la troupe des noceurs. Elle est précédée d’une paire, de bœufs attelés, empruntée à François Boyer. Entre les cornes des bœufs est calé un coussin sur lequel est « planté » un chou dans un « paillasson » (corbeille dans laquelle on met le pain). Ce chou a été déterré à l’aube dans le potager du père de la mariée. Le chou est enrubanné et arrosé de vin dont on casse la bouteille contre un mur. Pierre Brunaud, le plus déluré des jeunes gens, s’empare de la corbeille et monte la placer sur le toit de la maison, près de la cheminée. Si ce chou parvient à fleurir on en augura que le couple aura une nombreuse progéniture sinon, il restera jusqu’à que les intempéries le détruise. De retour à Lacoux, des jeux sont organisés dans la chènevière des Boyer. Une corde est tendue entre deux pommiers pour jouer au jeu du pot. On suspend deux pots contenant l’un de l’eau l’autre, une poule. Le premier participant choisi est Jacques Lasmier. Les yeux de Jacques sont bandés et une perche placée dans ses mains puis ont lui fait faire quelques tours sur lui-même pour finir par le placer face à la corde. Lasmier tâtonne jusqu’à ce qu’il touche un pot qu’il casse d’un seul coup de baton. Les assistants éclatent de rires car Jacques vient de casser le pot qui était rempli d’eau. Elisabeth se précipite sur son cavalier pour le sécher. Un début de colère commence à s’emparer d’elle lorsqu’elle entend quelques moqueries adressées à celui qui est devenu son amoureux.
Après avoir bien dansé arrive le soir. A la tombée de la nuit, Jacques va reprendre le chemin du Mas. Elisabeth serrée contre lui l’accompagne jusqu’après le Couderc. Sous le gros chêne qui marque le croisement des chemins de Peu-Razet et de Jouillat leurs lèvres se rencontrent. L’année prochaine Jacques Lasmier et Elisabeth Boyer vivront la même noce que viennent vivre Anne et François Peynot.
(à suivre)