Par pure et saine curiosité, je me suis intéressée à la « Guérite du Bagne », située à « Peume », à proximité des lieux-dits « La Pérelle », « La Goutte aux Bœufs ». Cette histoire est tellement extraordinaire et originale !
La Guérite est une petite maison de deux pièces datant de 1904 sans eau courante (une petite source derrière la maison fournissait l'eau), ni électricité avec une grande cave pittoresque et un petit appentis qui abritait les deux chèvres de la Thérèse. Des voisins pour les déranger ? Nenni, la Guérite est isolée au milieu de nulle part dans une clairière entourée d'arbres. Y vivaient deux tailleurs de pierre : Jacques Ducourthial né le 7 février 1861 à Saint-Hilaire, canton de Pionsat dans le Puy-de-Dôme (administrativement, depuis 1915, le canton de Pionsat -arrondissement de Riom- a été supprimé et rattaché à celui de Saint-Éloy-les-Mines) et décédé le 21 juillet 1924 ainsi que son compagnon Michaud. Est venue s'adjoindre au couple de tailleurs de pierre une femme, Thérèse Massonnaud dite « la Thérèse » née le 9 mars 1854 à Châtres commune de Chateauponsac (Haute-Vienne) et décédée à Ajain (Creuse) le 21 avril 1950 à l'âge de 96 ans.
Les hommes vivaient de leur travail, de la taille de la pierre, la Thérèse de la vente de ses fromages de chèvre, ils n'avaient aucun confort mais probablement qu'ils étaient heureux !
Après le décès de Jacques Ducourthial, donc après juillet 1924, Michaud son fidèle compagnon a disparu et je ne sais ni pourquoi, ni où il est parti. Quelques années se sont passées, la Thérèse vivait seule à la Guérite quand elle a eu l'idée d'y créer un café pour les visiteurs de passage, les bûcherons, les chasseurs … Le vin clairet attendait les clients et lorsqu'elle s'absentait pour ses chèvres, elle laissait un mot sur la porte :
« Thérèse revient. Elle est allée mener ses chèvres au champ ».
Le bouche à oreille a fonctionné, de plus en plus de monde s'est mis à fréquenter la Guérite, des fêtes ont été organisées, des fêtes animées par l'Espérance de Roches comme en témoigne cette photo prise par Louis Gravet, le photographe de Glénic, le 26 mai 1933.
Toutes ces personnes sont aujourd'hui décédées mais certains de leurs descendants ou d'autres qui les ont connues m'ont permis d'identifier 25 personnes de la photo. Il me manque la personne n°20 et la n°25. Par hasard connaîtriez-vous leur nom ? Ai-je fait une erreur dans l'orthographe des noms ? Avez-vous des anecdotes sur la Guérite ?
J'ai trouvé cette photo (qui date de 1933 et donc libre de droits) sur le site qui répertorie les photos de Louis Gravet. Ce site est libre d'accès. On peut voir le photographe sur cette photo tout près de Thérèse Massonnaud sous le n°13.
La Guérite respire la joie de vivre, le bonheur, le plaisir d'être ensemble, celui de partager... et lorsque j'y vais (toujours avec plaisir!), je ne peux m'empêcher de penser qu'il y a eu une vie au milieu de ces arbres, une vie festive, que les « clients de l'époque » y ont dansé, y ont chanté, qu'ils s'y sont amusés, qu'ils y ont fait la fête … Le personnage marqué n°23 et qui porte le nom de « Dunot » (son prénom ? Je ne sais) y montait des parquets pour danser.
J. Bouchet, ancien instituteur de Roches a écrit un très joli poème en août 1922 sur la guérite du Bagne :
Peume ! Peume ! Où souffle un vent glacial
Tu n'as pas effrayé ce brave Ducourthial
Sur ton âpre colline
Thérèse Massonaud
En servant la chopine
Élève ses chevreaux
Chasseurs et amoureux viennent à la Pérelle
Dans l'espoir d'y trouver la douce tourterelle
Par l'orage et la pluie, on entre à la Guérite
En compagnie d'un chien ou bien de Marguerite
On goûte au vin clairet, on boit le lait mousseux
Et puis l'on s'en revient par les sentiers herbeux.
Dans le blog du « Bistrot des Sports », Louis Camblor nous a fait partager un article intitulé « La Guérite du bagne relookée ». Parce que voici l'état de destruction dans lequel était tombé cette maison qui date de 1904: la végétation avait tout envahi, portes et fenêtres étaient en ruine, les toitures également...
La Guérite du Bagne telle que l'a trouvée le Comité des fêtes de Roches
Tout le mérite de cette restauration en revient aux bénévoles du Comité des fêtes de Roches qui ont effectué un travail remarquable. Une affaire rondement menée puisqu'ils y ont travaillé toute la fin 2017 ! Sans compter qu'il a beaucoup plu pendant cette période et que le temps ne les a pas aidés. Maintenant, grâce à eux, la Guérite ne risque plus son lent travail de détérioration et a retrouvé sa vigueur qu'avait insufflé Jacques Ducourthial, Michaud son fidèle compagnon et la Thérèse. Bravo à eux !
Les bénévoles ont utilisé les blocs de granit laissés par J. Ducourthial pour rajouter un appentis à la Guérite et en faire des tables ainsi que des bancs pour pique-niquer dans ce petit coin si agréable !
Article écrit mamsyl qui remercie Mr Gouyet, Mr Marie, Mme Guillon, Noelle